L’intelligence artificielle (IA) est désormais au cœur d’un nombre croissant d’innovations dans de nombreux domaines aussi variés que les véhicules autonomes, le Big Data et les sciences des données, le marketing ou les systèmes de reconnaissance faciale.
Le terme IA recouvre à la fois des concepts théoriques dont les bases ont été établies depuis plus de 80 ans, des outils technologiques en fort développement, des mises en œuvre pratiques déjà opérationnelles, et des projections futures à faible niveau maturité technologique.
Si l’on devait situer l’IA dans le champ des sciences et technologies représenté schématiquement sur la figure ci-dessous qui illustre d’une part un axe Biologie-Chimie-Physique b c j essentiel pour la conception de nouveaux matériaux et procédés et d’autre part deux pôles Information i et Energie e, sa place serait entre les sciences de la vie/biotechnologies et les sciences/technologies de l’information. Cette représentation graphique permet en particulier d’analyser les champs technologiques d’intérêt pour les conceptions futurs de nouveaux systèmes combinant matériaux, information et énergie, par exemple pour la mobilité 2D avec des véhicules connectés utilisant des vecteurs énergétiques renouvelables ou pour la mobilité 3D avec des dirigeables porteurs de charge tels que ceux actuellement développés par FLYING WHALES.
L’IA s’appuie d’une part sur les sciences cognitives et du cerveau et d’autre part sur les sciences de l’information et le traitement des données, que ces données soient massives (Big Data) ou en faible quantité, notamment issues de capteurs physiques (Low Data).
Il y a toujours eu une dimension biomimétique dans l’IA, par exemple à travers l’utilisation massive des réseaux de neurones et l’émergence du concept de « second cerveau ». Dans le même temps, le champ émergent des sciences cognitives irrigue les nouveaux développements de l’IA.
Les travaux de recherche sur le cerveau qui sont menés dans le cadre de grands programmes internationaux devraient conduire à une meilleure compréhension des mécanismes internes du cerveau et à plus tard à une modélisation de l’intelligence humaine, cette compréhension et ces modélisation étant les conditions clés d’une IA qui serait à la fois robuste, explicable et fiable.
Toutes ces avancées de l’IA suscitent depuis une dizaine année un nombre croissant d’innovations dans le Monde, avec une nette prédominance quantitative de la Chine et des Etats-Unis, l’Europe étant encore en net retrait. Ces Innovations sont le plus souvent des procédés et systèmes intégrant de l’IA, tandis que les innovations portant spécifiquement sur de nouveaux outils IA sont très minoritaires. Les dépôts de demandes de brevet d’ailleurs sont de remarquables indicateurs des centres de forte activité en IA. Les nombres de dépôts intégrant les mots-clés « Artificial Intelligence » en Chine, aux Etats-Unis, au Japon et en Europe suivent sur la période des dix dernières années des évolutions quasi-exponentielles, comme l’illustre la figure 2.
On observe que les dépôts IA en Chine l’ont été principalement par des universités et centres de recherche, tandis qu’aux Etats-Unis et en Europe, les dépôts IA sont majoritairement le fait d’entreprises et notamment de grands groupes du numérique et de l’électronique.
Sans surprise, les grands Offices de propriété industrielle dans le Monde ont des approches assez différentes vis-à-vis des inventions sur l’IA ou à base d’IA : l’Office Américain des Brevets (USPTO) a eu d’emblée une approche très ouverte et pragmatique comme il l’a toujours eu dans son histoire à l’égard des nouvelles technologies, alors que l’Office Européen des Brevets (OEB) adopte à l’égard de l’IA une position bien plus réservée en n’élargissant pas, bien au contraire, sa doctrine et ses directives sur le caractère non brevetable d’inventions relevant en tant que telles de méthodes mathématiques ou dans l’exercice d’activités intellectuelles ou de programmes d’ordinateur. La position de l’Office Chinois des Brevets (CNIPA) apparaît vis-à-vis des inventions IA comme pragmatique et plus ouverte que l’OEB, en ouvrant la voie à un large spectre d’inventions pouvant faire l’objet de dépôt de demande de brevet.
La capacité à obtenir en France ou en Europe une protection par la voie du brevet pour une invention intégrant de l’IA va en pratique dépendre de l’existence ou non d’interaction physique mise en œuvre dans l’invention et d’effet technique procuré par l’invention. Ainsi un procédé d’aide au pilotage d’un aéronef utilisant des techniques IA telles que des réseaux de neurones ou des techniques d’apprentissage profond (deep learning) ne devrait pas rencontrer de difficulté pour être éligible à la brevetabilité car ce procédé procure sans ambiguïté des effets techniques. A contrario, une intelligence artificielle dédiée au traitement de données massives (Big Data) et mettant des réseaux de neurones auto-apprenants pour délivrer des informations de tendance, sera très difficilement éligible à une protection par la voie du brevet dès lors qu’on ne pourrait pas établir d’interaction physique ou d’effet technique.
Par ailleurs si, comme les travaux de prospective tendent à l’indiquer, l’IA devenait de plus en plus biologique -voire biomimétique – en mimant certaines partie du cerveau, pourraient alors surgir des questions de fond sur la brevetabilité de procédés biomimétiques. Au-delà, les futures technologies hybrides de cerveau augmenté combinant vivant et électronique ouvriront de nouvelles voies d’innovation qui susciteront de nouvelles approches de protection de la propriété intellectuelle qui ne sont pas actuellement disponibles dans notre boîte à outils PI de 2021.
La pratique de l’OEB dans le domaine de l’intelligence artificielle (IA). • IP TRUST •
3 years ago[…] Le flot des demandes de brevets dans le domaine de l’IA, ou faisant appel à l’IA s’est fortement accru, notamment devant l’office européen. Cela a conduit cet office à rendre plus explicite sa pratique quant à l’examen de ce type de demande. […]